ARTICLES Lex Terra Avocat
Nouveaux CCAG : une reconnaissance légale du BIM à la portée non négligeable
Abstract :
Avec les nouveaux CCAG, le cadre réglementaire du BIM se renforce indéniablement sur le principe, mais aussi au regard de sa mise en œuvre.
Les définitions relatives au processus BIM, communes au CCAG travaux et MOE, représentent des repères importants et structurants pour les acheteurs publics, repères qui à terme dépasseront probablement la sphère des marchés publics.
Cité cet article : D. Richard, « Nouveaux CCAG : une reconnaissance légale du BIM à la portée non négligeable », LTA, 15 avril 2021.
Avec les nouveaux CCAG, le cadre réglementaire du BIM se renforce indéniablement sur le principe, mais aussi au regard de sa mise en œuvre.
Les définitions relatives au processus BIM, communes au CCAG travaux et MOE, représentent des repères importants et structurants pour les acheteurs publics, repères qui à terme dépasseront probablement la sphère des marchés publics.
Cité cet article : D. Richard, « Nouveaux CCAG : une reconnaissance légale du BIM à la portée non négligeable », LTA, 15 avril 2021.
1. Comme le signalait récemment ABCD Blog[1] dédié à la digitalisation des métiers de l’AEC[2], le BIM a été pris en compte par les nouveaux CCAG[3], issus de la série d’arrêtés du 30 mars 2021[4], conformément à l’article R2112-2 du code de la commande publique.
C’est bien entendu une très bonne nouvelle, d’autant que jusqu’à présent la réglementation sur les marchés publics avait une approche, disons minimaliste face au développement de l’immeuble numérique.
2. On le sait, en France, le BIM est une simple faculté plus ou moins conditionnelle[5], et les dispositions s’y rapportant[6] ne reflètent pas véritablement la portée de ce que représente ce processus pour l’industrie de la construction voire au-delà.
Bien entendu, cela n’empêche pas de nombreuses opérations d’être organisées en BIM dans le cadre de marchés publics comme de marchés privés. La BIMisation des nouveaux CCAG montre néanmoins la nécessaire adaptation de notre cadre réglementaire, qui n’en est probablement qu’à ses débuts.
3. Au-delà de l’arrivée du BIM, les arrêtés du 30 mars répondent à un vrai besoin de mise à jour législative et jurisprudentielle des précédents CCAG qui dataient de 2009. Les nouveaux textes devraient se mettre en place sans heurts. Pour rappel, ils sont le fruit d’une longue concertation (2 ans)[7] et leur entrée en vigueur au 1er avril dernier comprend une période intermédiaire, permettant aux acheteurs publics d’utiliser les anciennes versions jusqu’au 30 septembre 2021.
4. En dehors du BIM, l’une des grandes nouveautés des CCAG 2021 concerne le secteur de la construction. En effet, un sixième CCAG a été ajouté au cinq existant précédemment, et il se rapporte à la maîtrise d’œuvre (MOE).
5. Jusqu’à présent, la maîtrise d’œuvre ne donnait pas lieu à un cadre contractuel dédié. Les acheteurs publics comblaient ce manque de diverses façons, notamment en utilisant le CCAG PI, en le spécifiant et en y dérogeant par des dispositions prévues au CCAP. Il faut rappeler que le pouvoir adjudicateur possède une grande marge de liberté en la matière, puisque les CCAG ne sont pas, sur le principe, obligatoires, ce qui ne doit pas empêcher une certaine rigueur contractuelle afin de garantir la transparence et la cohérence des marchés.
6. La création d’un CCAG MOE et la prise en compte du BIM contribueront à des degrés divers à disposer d’un référentiel contractuel plus précis, aboutissant à une sécurité juridique accrue des opérations.
Sur le champ du BIM, cela sera le cas au regard de la hiérarchie des pièces contractuelles (II) et surtout la définition de notions clefs (I), puisque c’est dans ces deux domaines que des dispositions spécifiques sont prévues pour le CCAG travaux et le CCAG MOE.
I. Les définitions BIM des CCAG Travaux et MOE : des orientations structurantes
7. Des définitions communes aux CCAG MOE et travaux. La première référence au BIM dans les CCAG concerne les définitions du cahier des charges BIM, la convention BIM et au-delà la démarche BIM. Pour le CCAG Travaux comme le CCAG MOE, ces définitions se trouvent à l’article 2 des annexes de leurs arrêtés respectifs, d’ailleurs rédigés dans des termes similaires.
8. Portant sur le cahier des charges, la convention BIM et le BIM. Les arrêtés indiquent :
« – le « cahier des charges BIM » est le document élaboré par le maître d’ouvrage précisant les exigences et les objectifs des intervenants successifs du projet. Il constitue le volet BIM du programme du maître d’ouvrage ;
– la « convention BIM » de l’opération est le document décrivant les méthodes organisationnelles, de représentation graphique, la gestion et le transfert des données du projet, ainsi que les processus, les modèles, les utilisations, le rôle de chaque intervenant et l’environnement collaboratif du BIM. A chaque étape du cycle de vie du projet, la convention évolue et s’adapte aux nouveaux acteurs, à des usages nouveaux ou à des nécessités du projet. »
La version commentée de ces arrêtés précise :
« Le BIM (« Building Information Modeling » ou « Modélisation d’informations de la construction ») est une méthode de travail basée sur la collaboration autour d’une maquette numérique. Dans un processus BIM, chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier. En retour, il alimente la maquette de nouvelles informations pour aboutir au final à un objet virtuel renseigné, représentatif de la construction, de ses caractéristiques géométriques et des propriétés de comportement. ».
9. Une reconnaissance légale positive du BIM. La formulation utilisée par le législateur des notions BIM n’est pas sans rappeler d’autres sources documentaires déjà connues, et on pense en particulier au guide du PTNB[8] sur la maîtrise d’ouvrage publique[9]. Toutefois, les nouveaux CCAG marquent clairement une nouvelle étape, vers une reconnaissance légale du BIM. Un arrêté est une source de droit de niveau inférieur d’un point de vue normatif. Il n’en demeure pas moins que dorénavant le cahier des charges, la convention et même le BIM jouissent d’une définition réglementaire. Ces définitions valent pour la commande publique mais rayonneront probablement au-delà, étant précisé qu’à ce jour elles sont sans équivalents.
Ajoutons que cette reconnaissance dépasse le principe du BIM. Avec la référence au cahier des charges et la convention, les nouveaux CCAG évoquent également les modalités de mise en œuvre du processus.
10. Des orientations opérationnelles structurantes pour les acheteurs publics. Les définitions BIM des nouveaux CCAG induisent des lignes de conduite de fond possédnt des incidences pratiques d'importance.
Sans être exhaustif et de façon synthétique, quelques aspects peuvent être soulignés :
- La définition d’un cahier des charges BIM emporte la nécessité de la formulation d’une demande spécifique au BIM, donc un effort de préparation, qui écarte l’idée d’un marché « Do BIM. Merci ». Cet aspect est renforcé par la référence au programme du maître d’ouvrage et donc l’expression de ses besoins. Ce lien est naturel, mais le rappeler donne de la force à une démarche BIM en imposant de lui donner du contenu.
- La présence du duo cahier des charges, convention formalise l’idée d’une relation question-réponse, où chacun donne et reçoit. Là encore, rien d’extraordinaire, mais la posture est particulièrement importante pour le processus BIM, qui est justement un processus d’échanges. Ce mécanisme est d’ailleurs au cœur de la série de normes ISO 19650[10].
- La convention BIM est une pièce contractuelle à part entière d’un marché de travaux et de MOE. Ce constat peut paraître superfétatoire, mais en pratique ce point a pu soulever des questions et parfois plus.
- La convention est perçue comme un document évolutif par les CCAG. Ces évolutions recouvrent un spectre assez large, voire très large[11] et des questions se poseront sans doute en pratique. Cependant, la précision est d’importance, notamment pour une opération BIM mise en œuvre dans le cadre d’un marché en lots séparés.
- La référence à la maquette numérique caractéristique du processus BIM dénote également une évolution favorable au BIM. Remarquons par ailleurs que la notion de maquette (numérique ou pas a priori) apparaît à l’article 22 sur la propriété intellectuelle (CCAG MOE) à propos des résultats et des connaissances antérieures.
- Une définition ambitieuse du processus BIM. Le BIM des nouveaux CCAG prend clairement partie pour un processus collaboratif avec une maquette numérique commune : « chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier », et cela tout au long du projet. Les niveaux de maturité du BIM[12] sont aujourd’hui moins pertinents, mais si l’on devait s’y référer pour apprécier le BIM des nouveaux CCAG, nous serions a priori en présence d’un BIM de niveau 2 voire 3, soit un cap ambitieux.
II. La prévalence contractuelle du cahier des charges et de la convention BIM
11. La deuxième référence au BIM dans les nouveaux CCAG apparait à l’article 4 des annexes des arrêtés portant sur les pièces contractuelles, et plus précisément l’article 4.1 sur « L’ordre de priorité de ces pièces ».
Dans les deux cas sont cités :
« – le cas échéant, si l’opération fait l’objet d’une démarche BIM, le cahier des charges BIM du maître d’ouvrage ;
– le cas échéant, si l’opération fait l’objet d’une démarche BIM, la convention BIM et ses évolutions successives. ».
12. La mention du cahier des charges et de la convention BIM par ces dispositions a d’abord pour effet de leur donner une valeur contractuelle indiscutable, ce qui pour la convention est une clarification salutaire.
Ensuite, l’ordre retenu fait primer le cahier des charges sur la convention donnant un avantage au maître de l’ouvrage. D’une certaine façon, la posture règle la question de l’aval de la convention BIM par ce dernier, puisque dans tous les cas le cahier des charges primera.
Il faut noter que le CCAG MOE indique que l’offre technique du MOE (pièces écrites et graphiques) aura également priorité sur la convention BIM, qui sera à chaque fois le document de moindre importance.
Conclusion :
13. Les dispositions relatives au BIM dans les CCAG 2021 Travaux et MOE confortent ce processus sur le principe et le structure d’un point de vue opérationnel.
Ces apports demeurent sans doute limités au regard de la puissance des bouleversements induits par le numérique dans le domaine de la construction. Certaines options des CCAG vis-à-vis du BIM seront à juste titre discutées et rapidement des manques devraient apparaître, mais il ne faut négliger leur apport qui est bien réel, et plus généralement la reconnaissance du phénomène digital. Notons à ce propos, la numérisation du registre chantier (article 28.5 CCAG travaux) ou des DOE et DIOU (article 40.1 CCAG travaux).
[1]https://www.abcdblog.fr/le-nouveau-ccag-des-marches-publics-fait-mention-du-processus-bim-et-des-documents-afferents/
[2]Architecture, Engineering and Construction (AEC).
[3] Les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) fixent les stipulations de nature administrative applicables à une catégorie de marchés.
[4] Arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de travaux ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics industriels ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de prestations intellectuelles ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de techniques de l'information et de la communication ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de maîtrise d'œuvre.
[5] D. Richard, « Le droit du BIM (Building Information Modelling) », LexisNexis, 2020, §68 p.51 et s.
[6] Article R 2132-10 et 14 du code de la commande publique.
[7] Sur la consultation voire article L.131-1 et s. du code des relations entre le public et l’administration.
[8] Plan de Transition Numérique pour le Bâtiment devenu Plan BIM 2022.
[9] BIM et maquette numérique Guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage. Juillet 2016. PTNB.
[10] D. Richard, « Le droit du BIM (Building Information Modelling) », LexisNexis, 2020, §118 p.87.
[11] « … aux nouveaux acteurs, à des usages nouveaux ou à des nécessités du projet ».
[12] D. Richard, « Le droit du BIM (Building Information Modelling) », LexisNexis, 2020, §19 p.19.
C’est bien entendu une très bonne nouvelle, d’autant que jusqu’à présent la réglementation sur les marchés publics avait une approche, disons minimaliste face au développement de l’immeuble numérique.
2. On le sait, en France, le BIM est une simple faculté plus ou moins conditionnelle[5], et les dispositions s’y rapportant[6] ne reflètent pas véritablement la portée de ce que représente ce processus pour l’industrie de la construction voire au-delà.
Bien entendu, cela n’empêche pas de nombreuses opérations d’être organisées en BIM dans le cadre de marchés publics comme de marchés privés. La BIMisation des nouveaux CCAG montre néanmoins la nécessaire adaptation de notre cadre réglementaire, qui n’en est probablement qu’à ses débuts.
3. Au-delà de l’arrivée du BIM, les arrêtés du 30 mars répondent à un vrai besoin de mise à jour législative et jurisprudentielle des précédents CCAG qui dataient de 2009. Les nouveaux textes devraient se mettre en place sans heurts. Pour rappel, ils sont le fruit d’une longue concertation (2 ans)[7] et leur entrée en vigueur au 1er avril dernier comprend une période intermédiaire, permettant aux acheteurs publics d’utiliser les anciennes versions jusqu’au 30 septembre 2021.
4. En dehors du BIM, l’une des grandes nouveautés des CCAG 2021 concerne le secteur de la construction. En effet, un sixième CCAG a été ajouté au cinq existant précédemment, et il se rapporte à la maîtrise d’œuvre (MOE).
5. Jusqu’à présent, la maîtrise d’œuvre ne donnait pas lieu à un cadre contractuel dédié. Les acheteurs publics comblaient ce manque de diverses façons, notamment en utilisant le CCAG PI, en le spécifiant et en y dérogeant par des dispositions prévues au CCAP. Il faut rappeler que le pouvoir adjudicateur possède une grande marge de liberté en la matière, puisque les CCAG ne sont pas, sur le principe, obligatoires, ce qui ne doit pas empêcher une certaine rigueur contractuelle afin de garantir la transparence et la cohérence des marchés.
6. La création d’un CCAG MOE et la prise en compte du BIM contribueront à des degrés divers à disposer d’un référentiel contractuel plus précis, aboutissant à une sécurité juridique accrue des opérations.
Sur le champ du BIM, cela sera le cas au regard de la hiérarchie des pièces contractuelles (II) et surtout la définition de notions clefs (I), puisque c’est dans ces deux domaines que des dispositions spécifiques sont prévues pour le CCAG travaux et le CCAG MOE.
I. Les définitions BIM des CCAG Travaux et MOE : des orientations structurantes
7. Des définitions communes aux CCAG MOE et travaux. La première référence au BIM dans les CCAG concerne les définitions du cahier des charges BIM, la convention BIM et au-delà la démarche BIM. Pour le CCAG Travaux comme le CCAG MOE, ces définitions se trouvent à l’article 2 des annexes de leurs arrêtés respectifs, d’ailleurs rédigés dans des termes similaires.
8. Portant sur le cahier des charges, la convention BIM et le BIM. Les arrêtés indiquent :
« – le « cahier des charges BIM » est le document élaboré par le maître d’ouvrage précisant les exigences et les objectifs des intervenants successifs du projet. Il constitue le volet BIM du programme du maître d’ouvrage ;
– la « convention BIM » de l’opération est le document décrivant les méthodes organisationnelles, de représentation graphique, la gestion et le transfert des données du projet, ainsi que les processus, les modèles, les utilisations, le rôle de chaque intervenant et l’environnement collaboratif du BIM. A chaque étape du cycle de vie du projet, la convention évolue et s’adapte aux nouveaux acteurs, à des usages nouveaux ou à des nécessités du projet. »
La version commentée de ces arrêtés précise :
« Le BIM (« Building Information Modeling » ou « Modélisation d’informations de la construction ») est une méthode de travail basée sur la collaboration autour d’une maquette numérique. Dans un processus BIM, chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier. En retour, il alimente la maquette de nouvelles informations pour aboutir au final à un objet virtuel renseigné, représentatif de la construction, de ses caractéristiques géométriques et des propriétés de comportement. ».
9. Une reconnaissance légale positive du BIM. La formulation utilisée par le législateur des notions BIM n’est pas sans rappeler d’autres sources documentaires déjà connues, et on pense en particulier au guide du PTNB[8] sur la maîtrise d’ouvrage publique[9]. Toutefois, les nouveaux CCAG marquent clairement une nouvelle étape, vers une reconnaissance légale du BIM. Un arrêté est une source de droit de niveau inférieur d’un point de vue normatif. Il n’en demeure pas moins que dorénavant le cahier des charges, la convention et même le BIM jouissent d’une définition réglementaire. Ces définitions valent pour la commande publique mais rayonneront probablement au-delà, étant précisé qu’à ce jour elles sont sans équivalents.
Ajoutons que cette reconnaissance dépasse le principe du BIM. Avec la référence au cahier des charges et la convention, les nouveaux CCAG évoquent également les modalités de mise en œuvre du processus.
10. Des orientations opérationnelles structurantes pour les acheteurs publics. Les définitions BIM des nouveaux CCAG induisent des lignes de conduite de fond possédnt des incidences pratiques d'importance.
Sans être exhaustif et de façon synthétique, quelques aspects peuvent être soulignés :
- La définition d’un cahier des charges BIM emporte la nécessité de la formulation d’une demande spécifique au BIM, donc un effort de préparation, qui écarte l’idée d’un marché « Do BIM. Merci ». Cet aspect est renforcé par la référence au programme du maître d’ouvrage et donc l’expression de ses besoins. Ce lien est naturel, mais le rappeler donne de la force à une démarche BIM en imposant de lui donner du contenu.
- La présence du duo cahier des charges, convention formalise l’idée d’une relation question-réponse, où chacun donne et reçoit. Là encore, rien d’extraordinaire, mais la posture est particulièrement importante pour le processus BIM, qui est justement un processus d’échanges. Ce mécanisme est d’ailleurs au cœur de la série de normes ISO 19650[10].
- La convention BIM est une pièce contractuelle à part entière d’un marché de travaux et de MOE. Ce constat peut paraître superfétatoire, mais en pratique ce point a pu soulever des questions et parfois plus.
- La convention est perçue comme un document évolutif par les CCAG. Ces évolutions recouvrent un spectre assez large, voire très large[11] et des questions se poseront sans doute en pratique. Cependant, la précision est d’importance, notamment pour une opération BIM mise en œuvre dans le cadre d’un marché en lots séparés.
- La référence à la maquette numérique caractéristique du processus BIM dénote également une évolution favorable au BIM. Remarquons par ailleurs que la notion de maquette (numérique ou pas a priori) apparaît à l’article 22 sur la propriété intellectuelle (CCAG MOE) à propos des résultats et des connaissances antérieures.
- Une définition ambitieuse du processus BIM. Le BIM des nouveaux CCAG prend clairement partie pour un processus collaboratif avec une maquette numérique commune : « chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier », et cela tout au long du projet. Les niveaux de maturité du BIM[12] sont aujourd’hui moins pertinents, mais si l’on devait s’y référer pour apprécier le BIM des nouveaux CCAG, nous serions a priori en présence d’un BIM de niveau 2 voire 3, soit un cap ambitieux.
II. La prévalence contractuelle du cahier des charges et de la convention BIM
11. La deuxième référence au BIM dans les nouveaux CCAG apparait à l’article 4 des annexes des arrêtés portant sur les pièces contractuelles, et plus précisément l’article 4.1 sur « L’ordre de priorité de ces pièces ».
Dans les deux cas sont cités :
« – le cas échéant, si l’opération fait l’objet d’une démarche BIM, le cahier des charges BIM du maître d’ouvrage ;
– le cas échéant, si l’opération fait l’objet d’une démarche BIM, la convention BIM et ses évolutions successives. ».
12. La mention du cahier des charges et de la convention BIM par ces dispositions a d’abord pour effet de leur donner une valeur contractuelle indiscutable, ce qui pour la convention est une clarification salutaire.
Ensuite, l’ordre retenu fait primer le cahier des charges sur la convention donnant un avantage au maître de l’ouvrage. D’une certaine façon, la posture règle la question de l’aval de la convention BIM par ce dernier, puisque dans tous les cas le cahier des charges primera.
Il faut noter que le CCAG MOE indique que l’offre technique du MOE (pièces écrites et graphiques) aura également priorité sur la convention BIM, qui sera à chaque fois le document de moindre importance.
Conclusion :
13. Les dispositions relatives au BIM dans les CCAG 2021 Travaux et MOE confortent ce processus sur le principe et le structure d’un point de vue opérationnel.
Ces apports demeurent sans doute limités au regard de la puissance des bouleversements induits par le numérique dans le domaine de la construction. Certaines options des CCAG vis-à-vis du BIM seront à juste titre discutées et rapidement des manques devraient apparaître, mais il ne faut négliger leur apport qui est bien réel, et plus généralement la reconnaissance du phénomène digital. Notons à ce propos, la numérisation du registre chantier (article 28.5 CCAG travaux) ou des DOE et DIOU (article 40.1 CCAG travaux).
[1]https://www.abcdblog.fr/le-nouveau-ccag-des-marches-publics-fait-mention-du-processus-bim-et-des-documents-afferents/
[2]Architecture, Engineering and Construction (AEC).
[3] Les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) fixent les stipulations de nature administrative applicables à une catégorie de marchés.
[4] Arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de travaux ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics industriels ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de prestations intellectuelles ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de techniques de l'information et de la communication ; arrêté du 30 mars 2021 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de maîtrise d'œuvre.
[5] D. Richard, « Le droit du BIM (Building Information Modelling) », LexisNexis, 2020, §68 p.51 et s.
[6] Article R 2132-10 et 14 du code de la commande publique.
[7] Sur la consultation voire article L.131-1 et s. du code des relations entre le public et l’administration.
[8] Plan de Transition Numérique pour le Bâtiment devenu Plan BIM 2022.
[9] BIM et maquette numérique Guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage. Juillet 2016. PTNB.
[10] D. Richard, « Le droit du BIM (Building Information Modelling) », LexisNexis, 2020, §118 p.87.
[11] « … aux nouveaux acteurs, à des usages nouveaux ou à des nécessités du projet ».
[12] D. Richard, « Le droit du BIM (Building Information Modelling) », LexisNexis, 2020, §19 p.19.
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